teliss plume d'Alcyon
Nombre de messages : 1922 Localisation : Paris Date d'inscription : 01/10/2007
| Sujet: Extrait du "Calife désabusé" sur le temps de D. Re Sam 29 Déc - 1:49 | |
| J'ai longuement lu le poème d'Oncle Ben "Enfance"; je l'ai intensément ressenti, et il m'a fait tout naturellement penser à cet extrait du "Calife désabusé" qui dépeint le temps qui passe et le monde préservé de l'enfance; et je suis d'autant plus heureux d'avoir l'occasion de présenter cet extrait qu'il constitue pour moi une des plus belles pages du roman de Dominique : - Dominique a écrit:
- Ô enfance ! Ô temps! Nous sommes les exilés de l’enfance, nous sommes les exilés du temps. Notre mémoire enfermée dans l’argile du passé ajoute à chaque heure un mensonge nouveau à ce qui fut. A nos jours le temps amène d’autres jours et transforme chaque chose; rien de stable, rien de durable. Tout est là, insaisissable, ni derrière nous, ni devant nous …/… Il n’est pas de connaissance du temps. Voilé par le violent goût du devenir qui clôt nos oreilles, qui ferme nos yeux, le temps descend lentement en nous, suivant sa propre allure, différente de la nôtre. Il a son poids indépendant qui alourdit notre univers. Il s’assied sur nos épaules et contemple la poussière des jours passés : calcinées les heures, gorgés d’échec les cœurs. Tout au fond de nos âmes, il trie ce qu’a espéré l’insensé, ce qu’a attendu l’amour, ce qui a cessé de s’émerveiller. Ne reste que notre enfance qui lui oppose son paysage de lumière. C’est d’elle que jaillit parfois encore en nous une conscience brutalement claire que quelque part est accessible l’oasis de vie qui pourrait magnifier notre présent, le rendre enfin fécond, éternel. L’atteindre serait découvrir le bonheur; mais nous ne savons plus vivre l’enfance, car l’enfance ne cesse d’affronter ce qui paraît insensé et ne cesse de croire en son éternité. Nous ne savons plus vivre en dehors de nos propres règles et de nos habitudes. Nous ne savons plus aller ouvertement avec audace, vers ces empires qui ne s’offrent qu’aux âmes enfantines. Si nous tentions de nous élancer, nous reviendrions vite, craintivement, vers notre trou de solitude et de peur où le temps contraignant consentirait à notre détresse ses droits renouvelés… Ô enfance !…
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