Pourquoi ?
Quoique bien éveillé je revois ton visage
Qui vient s'interposer entre moi et l'écran
De mon ordinateur. Ce n'est vraiment pas sage
De venir me troubler quand j'écris un roman.
Je ressens ton parfum qui trouble ma narine,
Et le son de ta voix résonne à mon oreille,
La pression de ton front posé sur ma poitrine
N'est point une illusion, pas plus que je sommeille.
Je vis un cauchemar lorsque je sens ma main
Frémissante au contact de tes courts cheveux noirs,
Et puis, cruellement, tu t'estompes soudain
En me brisant le cœur. Il est ainsi des soirs
Où je ne reste plus devant la page blanche
Pour ne pas supporter ce genre de rencontre,
Ton fantôme revient pour prendre sa revanche
Jusqu'en pleine journée, et je ne puis rien contre.
Il me faut endurer l'effarante présence
Qui me ramène alors aux scènes du passé
Que nous avons vécues après l'adolescence
Partageant un amour qui finit contrarié.
Pourquoi te faut-il donc soumettre à la torture
Celui qui fut pour toi le plus fidèle amant
Et qui, ô grand jamais!... ne s'est rendu parjure
Au vœu qu'il prononça devant Dieu, en s'offrant
Comme un petit agneau qui va à l'holocauste
Se livrant par amour au divin sacrifice ?
Mon pacte ne fut pas comme celui de Faust
Le liant à Satan pour quelque bénéfice.
J'ai juré devant Dieu, cela en ta présence
De t'aimer à jamais, quoi qu'il puisse arriver ;
Toi qui as fait de même, as-tu en mon absence
L'impétueux désir de ne pas te renier ?
Je ne saurai jamais ce qu'il advint de toi
Mais ton spectre souvent revient me tourmenter,
Si je pouvais savoir quel en est le pourquoi
Je pourrais ressentir mon cœur bien plus léger.