CHANTE PAR L’ALIZE
Il a trainé ses mots tel un vieux balluchon
Attaché sur son dos comme unique bagage
Il en fait quelques vers, en fait une chanson
Qu’il égrène le soir au gré de son voyage.
Il frôle l’interdit et raille avec humour
Tous les gens de son temps qui lui donne pitance
Et lui le baladin, le nouveau troubadour,
Leur offre ses couplets, cette douce romance.
Quand au petit matin reprenant son chemin
Il restera dans l’air une chose magique
Deux trois mots murmurés, un étrange refrain
Chanté par l’alizé dans sa folle supplique.
Il chantera l’été, sa voix comme un frisson
Passera dans les dos tel un vent de passage
Dans un grand champ de blé fraichissant la moisson
Avant que ne s’énerve un nuage et l’orage.
A l’abri des épis ces quelques chants d’amour
Emporteront les corps dans leur tendre impatience
Pour se perdre en beauté dans les brumes d’un jour
Qui va sur l’horizon s’écraser en silence.
A la table le soir il pourra ce coquin
Faire rêver l’ami d’une nuit fantastique
De ces songes secrets, de ce plaisir divin
Chanté par l’alizé dans sa folle supplique.
Il use de ses mots la voilà sa mission
Ses rimes sont pour tous, la douceur du partage,
De la belle d’un soir au triste fanfaron
Qui viendront l’écouter dans sa course sauvage.
Il a vu des pays sans faire demi-tour
Visitant les manants toujours avec aisance
Avançant d’un bon pas sans suivre le tambour
Parcourant sans arrêts tous les sentiers de France.
Entrant dans un château pour un maigre festin
Il offrait au Seigneur sa chanson, sa réplique
Avant de repartir essaimer son douzain
Chanté par l’alizé dans sa folle supplique.
Princes parlez de lui, faites le sans détour
Lorsque le temps d’un trait masquera la présence
Du jeune troubadour dont le dernier refrain
Aux passants va laisser ce souvenir épique
D’un homme à qui les mots ont écrit ce destin
Chanté par l’alizé dans sa folle supplique.
jc blondel