Le canal St- Martin
La nuit, sombre et froide, a noyé le canal St-Martin
Et son ombre a englouti les tentes des sans-abris.
Elles renaîtront, triste vision, dès le petit matin,
Pour déverser, sur les berges, ceux qui n'ont pas d'amis.
Nous les croiserons peut-être, au détour d'une rue,
Qui arpenteront les trottoirs jusqu'au soir.
Echevelés, pas rasés, trop peu et mal vêtus,
Ils étaleront, sous nos yeux, leur triste histoire.
Parfois, du bout des doigts, nous ferons l'aumône
D'une petite pièce, à l'un de ces traîne-misère,
Etonnés qu'humilié, il bougonne et marmonne ;
Lui, si pauvre, serait-il, oserait-il être si fier ?
Nous voulons ignorer qu'elle est mince la frontière
Qui sépare le vrai chagrin de la légitime colère
Et qu'il faut nous souvenir, dans nos prières,
Que tous les hommes, même eux, sont nos frères.