les rhumeries des villes
J’aime l’âcre parfum des rhumeries des villes,
La sueur disputant aux alcools volatiles
Le règne des saveurs sur le bout de nos langues.
J’aime boire la joie aux rhumeries qui tanguent.
Les tables sont des fûts bancals ou tous tranquilles.
On sirote debout à portée des barils
Le fort sucre de canne étourdissant d’ardeur,
Ou l’on discute assis en vidant son oubli.
On relègue au jamais les ennuis d’aujourd’hui
Sans honte en trébuchant sur un pli de vapeur,
A vrai dire en butant sur des mots inutiles.
On relève en riant les échos malhabiles.
Ces soirées de bien-être où les pleurs se défilent
Sont comme un coup de pied au cul des jours qui passent.
Les soupirs ne sont plus que nostalgie fugace,
Ces soirées de chaleur comme venues des îles.
Parfois je sens monter la vague inspiration
Dans mon crâne venue déposer sa chanson,
Mais l’heure est aux plaisirs du présent délébile.
Parfois je noue des mots en poésie facile.
C’est comme un va-nu-pieds sans but et sans idylle
Que j’y vais relâcher un peu de mon salaire
Pour embrasser la vie au goulot et fébrile.
Je suis comme un bateau mouillant en Basse-Terre.
J’aime chanter au feu qui brûle et nous anime
Ces soirs où ignorant les faux de la déprime
Dans nos coeurs tolérants l’amitié se faufile.
J’aime l’éternité des rhumeries des villes.